Orient-Express VS Transsibérien : mythe contre mythe
mardi 29 novembre 2022 |
Ce sont les trains les plus mythiques de toute la famille ferroviaire. Le Transsibérien et l’Orient-Express. Leurs légendes se sont construites en parallèle. De quels fantasmes sont-ils le nom ? Discovery Trains ouvre le match.
Orient-Express - Transsibérien : l’enfance des mythes
Le rêve de l’Orient-Express et celui du Transsibérien se sont forgés presque en même temps, à quelques milliers de kilomètres l’un de l’autre. L’idée du Transsibérien commence à germer dans les années 1860 dans l’esprit du Comte Mouraviev-Amourski, gouverneur général de Sibérie. C’est lui qui en souffle l’idée au Tsar. Pratiquement à la même période, le jeune belge George Nagelmakers qui a découvert aux USA les célèbres wagons Pullman rentre en Europe pour créer la Compagnie Internationale des Wagons-Lits.
Comte Mouraviev-Amourski © Wikipédia George Nagelmakers © Wikipédia
Evidemment, le Transsibérien prend du retard. Car les rails qui relient Moscou à Vladivostok tardent à être mis en place. Alors que dès 1883, l’Orient-Express prend le départ à Paris, en direction d’Istanbul, sur les rails européens, le lancement de la construction de la ligne du Transsibérien doit attendre 1891. Mais dès cette époque, les deux mythes commencent à prendre forme.
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L’âge d’or des trains mythiques
De nombreux obstacles se sont dressés sur la route du Transsibérien. Le grand projet du Tsar Alexandre III s’est évidemment confronté aux forces de la nature : terrible rigueur du climat, immensité des territoires, démesure des fleuves à enjamber, des lacs à contourner, des montagnes à percer… Des milliers d’hommes, condamnés et forçats ont payé de leur vie le succès de l’aventure. Mais en 1916, la route globale du Transsibérien est enfin terminée et le train file à travers les 9000 km de la Russie.
La ligne transsibérienne en 1904 © Wikipédia
De son côté l’Orient-Express doit rapidement faire face aux troubles politiques en Europe. La guerre des Balkans en 1912 puis la Première Guerre mondiale mettent un vrai coup de frein à l’aventure. Mais l’entre-deux-guerres marque son âge d’or. 1926 est considérée comme l’année de la naissance du style Orient-Express. Les plus belles voitures jamais imaginées par des designers sortent de ses ateliers, décorées par les deux célèbres René : René Lalique, le maître verrier, et René Prou, le décorateur.
Carte postale de l'Orient-Express, 1900 © Wikipédia
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Les proses du Transsibérien
L’Orient-Express, le Transsibérien ont aussi marqué les esprits de leurs contemporains grâce à leur incarnation dans l'art et la littérature. Le premier livre européen qui parle du Transsibérien est écrit à une époque où ce train n’existe pas encore. Il s’agit de Michel Strogoff, le roman de Jules Vernes. Le « trans-sibérien » d’alors est un héroïque coursier du Tsar qui doit traverser une partie de la Sibérie pour porter au frère du roi un message vital pour l’empire. Michel Strogoff affronte tous les éléments, les forces sauvages et démesurées de la Sibérie. Et les descriptions de l’auteur français qui, sans être jamais allé en Russie, se trouve être très bien informé, donne aux lecteurs européens une première idée de la Sibérie indomptée et dangereuse.
En 1913, le livre de Blaise Cendrars prend le relai. « La Prose du Transsibérien » est une ode à l’aventure, à la jeunesse, à la découverte. On y lit la fureur de vivre, de se confronter, de se mesurer aux autres et à soi-même. Et la joie puissante, romantique et solitaire du voyage.
Avec l’avènement du communisme à l’Est, puis l'instauration de la Guerre Froide, le mythe du Transsibérien se teinte d’une nuance soviétique, venant renforcer pour l'Européen de l'Ouest moyen l’idée de danger, d'inconnu et d’aventure qu'il portait déjà en lui.
Agatha Christie et mythe de l’Orient-Express
La légende de l’Orient-Express, pour sa part, s’est essentiellement bâtie grâce au pédigré très élevé de ses voyageurs : rois et hommes d’Etats, acteurs et cantatrices, magnats et starlettes. Dès sa création, le luxe et le glamour font partie du code génétique du train. Mais c’est Agatha Christie qui lui apporte la touche de mystère et d’aventure qui lui manquait. On peut presque considérer que la lady anglaise a coconstruit son mythe. Le « Crime » et ses nombreuses adaptations ont largement contribué à la légende de l'Orient-Express, renforcée quelques dizaines d’années plus tard par les « Bons Baisers de Russie » où un certain James Bond s'ébattait à bord dans des scènes intrépides et romanesques à souhait.
Le mythe plus fort que les trains
Il est amusant de constater que chacun à leur manière, ces deux trains que tout le monde connait à travers leur légende ne sont pas réellement des trains. Dès les années 20, l’Orient-Express cesse d’être un seul train. Il devient le terme générique pour désigner toute une collection de trains de luxe qui sillonnent l’Europe centrale et même l’Europe du Sud. Au point que le « Crime de l’Orient-Express » lui-même ne se déroule pas à bord de l’Orient-Express originel, mais de l’un de ses avatars ! Il est symptomatique aujourd’hui que différents trains de luxe se revendiquent les authentiques héritiers du véritable Orient-Express !
De son côté, le Transsibérien n’existe tout simplement pas. Aucun train ne porte ce nom. Seule existe la « ligne transsibérienne » qui relie Moscou à Vladivostok. Et par métonymie, tous les trains qui circulent sur cette voie peuvent prétendre au titre de Transsibérien. Quand bien même ils ne circulent en réalité que sur un tronçon réduit en amont ou en aval du Baïkal. Il est de fait techniquement impossible de décrire le « transsibérien » qui peut avoir de nombreuses variantes de locomotives russes et de voitures.
A bord du train de luxe Venise-Simplon-Orient-Express © Belmond
Mais le fait de ne pas exister concrètement n’empêche pas, au contraire, les trains mythiques d’occuper l’imaginaire des voyageurs et des rêveurs. Au mythe de l’Orient-Express on attachera sans doute les images du Luxe, du Glamour et du Raffinement. Au mythe du Transsibérien on réservera la Démesure, l’Evasion, le Goût de l’inconnu. Mais les deux se retrouveront sur une valeur essentielle au rêve comme au voyage : l’Aventure !
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